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Bienvenue sur le site de l’association MORIAL

Notre objectif : sauvegarder et transmettre la mémoire culturelle et traditionnelle des Juifs d'Algérie. Vous pouvez nous adresser des témoignages vidéo et audio, des photos, des documents, des souvenirs, des récits, etc...  Notre adresse

 e-mail : morechet@morial.fr -  lescollecteursdememoire@morial.fr

L’ensemble de la base de données que nous constituons sera  régulièrement enrichie par ce travail continu de collecte auquel, nous espérons, vous participerez activement.  L'intégralité du site de Morial sera déposée au Musée d’art et d’histoire du Judaïsme (MAHJ) à Paris, pour une conservation pérenne .

Tlemcen, le kiosque à musique au centre ville
Médéa : rue Gambetta (1945)
Alger : rue d'Isly (1930)
Une oasis à Ouargla (Territoire du Sud algérien)
La Grande Poste d'Alger (Photo J.P. Stora)
Square Bresson
Lycée E.-F. GAUTIER D'ALGER
Service Alger - Bouzareah
Alger : le marché de la place de Chartres
MEDEA - Le Café de la Bourse
Guyotville - La Plage

 

                 L'acteur et le réalisateur culte par son accent et son talent nous a quittés le 28 Novembre 2020                    

                             MORIAL REND HOMMAGE A PHILIPPE CLAIR

                                           

 

                               « PLUS BEAU QUE MOI...Tu meurs !

                           Plus Chaleureux que moi... Tu meurs !

                           Plus Gracieux que moi.... Tu meurs ! »

 

 

 

Très Chère Madame Philippe Clair,

 

Que dire de ces moments magiques, inoubliables passés chez vous auprès de votre époux…

 

Philippe CLAIR, l’Artiste, mais aussi et encore plus, Prosper BENSOUSSAN, était vraiment un grand personnage, grand par sa taille, grand par sa générosité d'accueil, grand pour le temps passé auprès de lui, grand par son talent, grand par son engagement tellement sincère dans le projet que nous venions lui présenter… grand par sa voix tonitruante, son rire, sa modestie, sa capacité de travail.

Quel souvenir, cette préparation d’un spectacle organisé par MORIAL, en 2016, où vous avez interprété avec brio les personnages de « La Parodie du Cid » écrit en vers et en Pataouète, par Edmond Brua et dont vous aviez réalisé l’adaptation cinématographique

« Rodriguez au pays des Merguez » en 1979.

Ah ! Vous aviez eu le génie de faire de Don Rodrigue, RoRo, le Rodriguez qui vient du pays des Merguez. vous l’avez immortalisé, et il restera pour toujours emblématique de notre Algérie.

Chez vous, de semaine en semaine, jusqu'à la fameuse représentation à l’Espace Rachi,

nous avons pu apprécier l’homme, qui par la finesse de son analyse des textes, a su donner et redonner au Pataouète de « chez nous » ses lettres de noblesse, tout impressionné et admiratif que nous étions de votre stature (et de votre beauté !)

Vous nous avez régalés, lors de nos visites, d’anecdotes savoureuses sur votre carrière d’acteur, de réalisateur, et de comique.

Vous resterez dans nos cœurs pour toujours...

 

MERCI Monsieur Philippe CLAIR de votre gentillesse,

MERCI Monsieur de votre finesse,

MERCI Monsieur de votre talent,

MERCI de vos succès,

MERCI de votre faconde,

MERCI de votre charme,

MERCI de votre éloquence,

MERCI de votre humour (un régal de vous écouter nous dire les vers de cette parodie)

 

l'Association MORIAL vous remercie pour avoir honoré de votre présence, de votre travail, cette tellement belle prestation à l'Espace Rachi.

Philippe Clair…. c'était LA CLASSE !

 

Chère Madame Clair, au nom du Président de MORIAL, Serge DAHAN et des membres du Bureau, nous vous adressons ainsi qu'à votre fils Esteban, nos sincères condoléances les plus attristées.

Qu'il repose en Paix                                                                                    

 

                     voir ou revoir l'extrait  de la soirée :

                    

                               cliquer sur l'image ci-dessus:

 

lien de la vidéo de la soirée pataouète :

https://www.morial.fr/evenements-3/835-soiree-pataouete.html

   

 

 

                 Au dernier survivant 

 

                              Par

 

           Le Rabbin DANIEL FARHI             

            (18/11/1941- 23/08/2021)

 

 

 

Sermon prononcé le 30/04/1992

Où que ce soit, quand que ce soit, je serai là avec toi, le dernier survivant...

Tu t’appelleras Yankélé ou Maurice, John ou Yitzhak, Hannalé ou Rosa, Joanna ou Madeleine;

Tu habiteras Jérusalem ou Paris, Chicago ou Moscou, Southampton ou Amsterdam.

Parce que tu seras le dernier survivant, je serai làje te le promets.


Je te promets d’être la mémoire de ta mémoire.


Je te promets que ce que tu as enduré ne sera pas oublié de la conscience humaine.


Je te promets cette ultime justice de ne pas laisser ton nom ni ta souffrance disparaître de l’histoire universelle.

 

Tu étais un seul homme, une seule femme. Pourtant, c’est comme si tu avais été une humanité souffrante.

Et, parce que tu seras le dernier, ce sera mon devoir de reprendre ton martyre comme on prendrait un relais, non pour le revivre, mais pour le dire aux temps futurs, pour témoigner devant l’histoire afin qu’on n’absolve plus des criminels, pour l’enseigner aux enfants et qu’adultes devenus, ils construisent une société consciente de son passé et résolument tournée vers un avenir de justice, de fraternité et de paix.

 

Daniel Farhi 

 

Par Didier NEBOT

Lundi 3 Avril 16 h 15 :

Conférence "2000 ans d’histoire juive en Algérie" ; Le médecin de Kumram avec Didier Nebot. Médecin, historien et romancier, Didier Nebot est président de l’association Morial, mémoire et traditions des juifs d’Algérie.

Coordonnées

GRAINE DE PSAUMES

ADATH SHALOM

8, rue Georges Bernard Shaw
75015 Paris  Métro Dupleix (ligne 6)

Pour en savoir plus :

https://www.ose-france.org/les-domaines-dactions/memoire/le-cafe-des-psaumes-graines-de-psaumes/graines-de-psaumes/

 

Présentation par le Rav Sadia Morali

Lundi 27/03/2023, Réunion Zoom : 13.30 USA, 19.30 France, 20.30 Israël
Numéro de réunion : 86 94 34 80 782 - Mot de passe : 9
- Rav Ariel Rebibo, Rabbo, du Mercaz - Strasbourg :
"La sortie d'Egypte un contre-exemple de Guéoula ?"
- Yossi Touitou, guide et enseignant : "17 minutes qui changent l'histoire"
- Rav Eytan Fisson, rav de la communauté Chorachim, "On ne dira plus on est sorti d'Egypte"
- Professeeur Ari Afilalo, profeseur de droit (USA) "La Guéoula selon Baal Asoulam"

 

YouTube :  https://www.youtube.com/@lesrencontresduravsaadiamo4315

 

 

Célébration de Pessah, la Pâques juive. (© Getty Images)Célébration de Pessah, la Pâques juive. (© Getty Images)

       

  Pessah, si lointain, si proche

 

                        Par

 

      Jean-Luc ALLOUCHE

Au milieu des parfums printaniers, à Constantine, dès les lendemains de Pourim, l’atmosphère dans les demeures juives changeait du tout au tout. On chaulait les modestes logis, on retirait d’un placard soigneusement cadenassé la vaisselle de Pâque, les marchés commençaient à se remplir de blocs de sel gemme, de légumes de saison apportés par les vendeurs arabes. Ceux-là connaissaient le calendrier hébraïque mieux que, parfois, certains juifs eux-mêmes. (De même que, pour les Yamim noraïm, les Jours redoutables, ils savaient offrir les coings, les jujubes, les grenades et autres ingrédients indispensables à la fête.)

Au Talmud-Torah, l’étude intensive et la cantillation de la Méguila d’Esther à peine derrière nous, nos maîtres nous attelaient à celles de la Haggadah de Pessah et à l’apprentissage du Séder. Qu’on imagine des marmots, souvent chahuteurs, ânonner, voire brailler, Ha la' hma anya (que les plus facétieux singeaient en Oudjadja‘amya– « La poule est aveugle » ou le fréquent Chénéémar en :« J’en ai marre »). Mais le nerf de bœuf de nos rabbins avait trop tôt fait de rétablir un semblant d’ordre.

Pour autant, ces heures de répétition ont fait que mes contemporains des années 50-60,  bons élèves ou non, sont toujours capables de réciter la Haggadah par cœur.

Au logis, à quelques heures du Séder, les préparatifs s’accéléraient : dernières touches de nettoyage des placards, des éviers, des ustensiles à cachériser (la hag’alachez nous, on prononçait : la ghala, l’ébouillantage des marmites, casseroles et autre poêles), la chasse à la moindre miette de pain dans tous les recoins, pour s’achever par la cérémonie grandiose et ténébreuse de la bdikat hamets, la recherche du hamets, avec mon père en grand-prêtre de l’épuration hygiénique, une bougie dans une main, une plume dans l’autre, traquant les morceaux de hamets que, nous ses enfants, avions disséminés un peu partout, non sans lui réserver quelques embûches dans des endroits improbables. Le lendemain, nous les brûlions avec des cris de Sioux.

Puis venait le moment si attendu, l’essayage d’une petite gandoura taillée à nos mensurations juvéniles. Enfin, nous serions des princes orientaux dans nos vastes sérails de quelques pauvres mètres carrés.

Mais, déjà, nos mères, nos tantes, nos cousines, mettaient la dernière main aux repas des deux jours de fête ; la plus experte dressait le plateau du Séder (« Non je te dis que l’épaule d’agneau, c’est pas là qu’il faut la mettre ! » ne manquait pas de regimber une voisine passée constater– surtout, traquer – le bon ordonnancement.) Rien de grave, la main hiératique du père corrigerait les bourdes éventuelles.

Et, bien sûr, comme il convient de « s’accouder » comme des hommes libres, l’espace de deux soirées, nous nous transformions en pachas se prélassant dans leur harem. Pour ce faire, chez ma tante Yvonne et mon oncle Jacques, place des Galettes (ou Rahbet Es-souf), on aura démonté une porte, posé sur deux bas tréteaux, et accumulé matelas et coussins, e la nave va...

Mon père donnait le signal du départ de cette anabase mémorielle par la bénédiction du vin (et, émotion de l’officiant sans doute, est-il une Haggadah qui ne soit pas tachée de vin ?

Ces macules que nous retrouvons d’année en année, souvenirs de l’horrible bibine cacher– cachir, disions-nous – du vin Habib, plus tard, du Carmel Mizrahi, avant de jouir enfin de crus bien gaulois et savoureux, mais toujours aussi cacher).

Venaient ensuite le privilège insigne du père de famille : lui seul effectuaitses ablutions sous une eau versée d’une cruche par une femme (et, certes, la gent féminine, outre ses besognes ménagères culinaires, remplissait un rôle insigne lors du cérémonial, en particulier en faisant tournoyer le plateau du Séder au-dessus des crânes des convives, etc.)

Mais, récompense suprême, le père de famille traduirait toute la Haggadah en judéo-arabe et, face à ses enfants impatients qui voulaient vite consommer la reine des mets, le harosset (ay’lak, disait-on chez nous), puis le r’mo– je n’explique pas, comme dit le Talmud : celui qui sait, sait), auguste, il répondait : « Je le fais pour que les femmes comprennent... »

J’arrête là l’évocation, qui me prendrait des heures, comme nos soirées « là-bas ».

Ici, au début du « rapatriement », nous avons bien démonté une porte à l’occasion, étalé des matelas et des coussins au sol, mais nos chants ont baissé de plusieurs octaves (« Les voisins, faut faire attention »), puis nous nous sommes juchés sur des chaises, les nouvelles générations se sont mises à regarder les traductions en français,voire les transcriptions de l’hébreu en caractères latins, le Séder s’est peu à peu raccourci...

Mais, il n’empêche : Pessah (ou plutôt : Bissah) demeure notre Grande Parade annuelle des retrouvailles familiales. Et, comme avant, nous ne manquerons pas de clamer en pensant aux absents : Laykounmout l’gharbyinLà encore, je ne traduis pas. (Ou, alors, interrogez vos anciens.) Les grandes affections et douleurs doivent garder leur part de mystère.

 

Jean-Luc Allouche

 

 

     

 

       Quand l’Algérie devint séfarade

 

                            Par

 

             Jean Luc ALLOUCHE

                            (1)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La première vague ne débarque pas, comme on le croit, avec l’expulsion des juifs d’Espagne de 1492.

Car c’est un siècle plus tôt, en 1391, que des juifs catalans et majorquins, à la suite de persécutions, s’exilent en Afrique du Nord, et précisément en Algérie.

 

La deuxième grande vague de 1492, plus importante, choisira plutôt le Maroc – la situation politique et économique de l’Algérie étant, à cette époque, épouvantable.

Après 1492, l’arrivée de juifs espagnols s’étale jusqu’au XVIe siècle qui connaît un afflux de marranes du Portugal, de France, d’Italie (Livourne essentiellement, longtemps centre intellectuel du judaïsme maghrébin, grâce à ses imprimeries) et même de Constantinople.

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(1) Conférence présentée par Jean Luc Allouche lors du colloque du 10/10/2018 organisé par l’association MORIAL : « Les Juifs d’Espagne »

 

Par Jean-Luc ALLOUCHE

L’arrivée et l’installation en Algérie.

Dans mon enfance constantinoise, j’avais quelques bons compagnons d’école primaire et du Talmud Thora nommés Cassuto, Benisti, Nahmias, Chicheportiche. Dans mon esprit, leurs patronymes n’étaient pas moins judéo-berbères que Barkats, Fitoussi, Guedj, Halimi ou… Allouche.

Ce n’est que bien plus tard que j’ai appris que Cassuto était d’origine livournaise ; que Bénisti était la contraction-corruption de « Beneviste » (« Sois le bienvenu ! », en catalan ou en espagnol). Quant à Chicheportiche, est-il rien qui sonne davantage maghrébin que ce nom ? Eh bien non, c’est le très lusitanien Sasportes, Sasportas, Saporta, qui dériveront ensuite, sous les cieux d’Afrique du Nord, en Partouche, Sportouch, etc.

(Sur ce point, l’écriture hébraïque vole à notre secours : pour transcrire la lettre « S », les rabbins utilisaient la lettre « shin » / sin », selon que le point diacritique est à droite ou à gauche ‒ d’où le glissement graduel de Sasportas en Chicheportiche.)

Ainsi donc, l’onomastique nous livre un premier aperçu, certes anecdotique, de la lente pénétration, puis acclimatation du judaïsme ibérique en Afrique du Nord où les juifs autochtones retraçaient leurs origines jusqu’aux lointains de l’Histoire, depuis les déportations romaines de juifs de la Terre d’Israël jusqu’aux Berbères judaïsés, avant même l’arrivée de l’islam.

A ce point, il convient de redresser une erreur commune – qui fut longtemps, je l’avoue, la mienne : la première vague ne débarque pas, comme on le croit, avec l’expulsion des juifs d’Espagne de 1492.

Car c’est un siècle plus tôt, en 1391, que des juifs catalans et majorquins, à la suite de persécutions, s’exilent en Afrique du Nord, et précisément en Algérie.

 

La deuxième grande vague de 1492, plus importante, choisira plutôt le Maroc – la situation politique et économique de l’Algérie étant, à cette époque, épouvantable.

Certes, les échanges entre juifs d’Ibérie et d’Afrique du Nord, de même que la résidence d’un côté ou de l’autre de la Méditerranée, étaient antérieurs et fréquents : cette circulation remonte aux premiers temps de la conquête arabe. L’un des exemples fameux est celui de

la famille de Maïmonide fuyant les persécutions des Almohades et s’installant brièvement à Fès. Dans l’autre sens de l’itinéraire, un autre exemple prestigieux, celui de Rabbi Yitzhak ben Yaacov Alfassi (dit le « Rif»), décisionnaire monumental, né à Kala’at Hamad, près de Constantine (et non à Fès, malgré son surnom dû à son séjour et à son enseignement dans cette ville), s’établit en Espagne. D’autres érudits maghrébins – comme R. Haïm Gaguine ou R. Saadya ibn Danan – ont longtemps vécu en Espagne jusqu’à l’expulsion de 1492.

Au demeurant, cette porosité entre les deux rives concernait aussi, cela va sans dire, les musulmans ; somme toute, Andalousie et Maghreb représentait alors une grande entité politique, Une « Union pour la Méditerranée » avant la lettre, et nombre de musulmans se réfugiaient, eux aussi, dans les royaumes d’Afrique du Nord, au gré des persécutions qu’ils subissaient à Cordoue ou à Séville. D’une certaine manière, les expulsés des deux religions poursuivront leur cohabitation sur la terre africaine, partageant au moins une langue de culture commune : l’arabe.

Pour autant, en Afrique du Nord, le choc des épées et des cultures avec l’Espagne ne cessera pas : là, les expulsés se heurtent encore aux exactions des Espagnols, comme, entre autres, celles menées par les troupes du cardinal Ximenes qui massacrent les juifs d’Oran, de Bougie et de Tripoli (1509-1510) et que rapporte la célèbre chronique de Yossef Hacohen (‘Emek habah’a, « la Vallée des pleurs »).

On peut ainsi comprendre que l’héritage espagnol fût moins en faveur chez ces expulsés (mégorachim) que chez leurs coreligionnaires accueillis dans l’empire ottoman, en Turquie, en Grèce, en Egypte, au Proche-Orient, dans les Balkans et ailleurs, par Bajazet II à la bienveillance politique aiguisée, auquel on attribue cette remarque :

« Vous appelez Ferdinand un monarque avisé, lui qui a appauvri son empire et enrichi le mien ! »

Aujourd’hui encore, leurs lointains descendants cultivent une certaine nostalgie de leurs juderias et de la langue espagnole, nostalgie quasi inconnue chez ceux d’Afrique du Nord (à l’exception, peut-être, des juifs hispanophones du nord du Maroc). Pour ces descendants, l’Espagne, devenue si lointaine, et perdue, se pare toujours des mille feux de l’absence.

Pour les mégorachim arrivés en Afrique du Nord, elle ardait encore des brasiers des persécutions, à quelques encablures de leur nouvelle terre d’accueil.

Les expulsés de 1391 avaient d’autant plus de facilité à traverser la Méditerranée que des juifs d’Espagne s’étaient déjà installés en Afrique du Nord pour toutes sortes de raisons, tel Rabbi Chaoul Astruc résidant à Alger. Cette ville sera la première a accueillir les expulsés de 1391. Mais le royaume mérinide, dont Alger est la capitale, est en plein déclin et en butte aux attaques de l’Espagne et du Portugal. D’autres rejoindront le royaume zianide, avec Tlemcen pour capitale. De manière générale, l’accueil des musulmans ne fut pas totalement hostile, à l’exception de quelques incidents sporadiques. Pour autant, parfois, ils étaient fort mal reçus, surtout dans les villages, comme en témoigne la Vallée des pleurs.

A rebours, l’accueil de leurs frères locaux n’était pas, à l’occasion, toujours affable. D’un responsum (téchouva) de Rabbi Yitzhak bar Chéchet (1326-1408) le fameux « Ribach »), concernant le débarquement de 45 réfugiés de Majorque, Valence et Barcelone, il s’avère qu’un quidam juif – d’origine espagnole ! – avait intercédé auprès du cadi afin qu’il empêche ces expulsés descendre de leur vaisseau sans s’acquitter d’une taxe… Bon prince, le cadi refusa cette mesure. Avec ces mots à l’adresse des fidèles musulmans :

« Je croyais que vous étiez des croyants, mais je constate que vous êtes des rebelles. Par conséquent, je ne vois pas pourquoi Dieu vous apporterez votre subsistance en ce monde. Un individu ne vit-il pas en obéissant simplement à la parole de Dieu ? »

(Au demeurant, nombres d’expulsés musulmans d’Espagne se heurtèrent aux mêmes préventions de la part de leurs coreligionnaires d’Algérie…)

A la suite de cet incident, Le Ribach aura cette apostrophe :

« Lorsque j'ai appris que certains Juifs se plaignaient de la venue d'autres coreligionnaires, je n'ai pu me contenir et j'ai annoncé devant quatre ou cinq personnes : voici que le prince et même le cadi désirent les admettre, et ce sont des Juifs qui font obstacle à cela ! Ceux qui chercheront à refouler ces juifs misérables à Majorque éprouveront de la honte dans ce monde-ci et dans le monde futur ! ».

Bon an, mal an, les mégorachim s’installent en majorité le long du littoral, depuis Honeïne à l’ouest, Oran, Mostaganem, Ténès, Alger, Bougie, jusqu’à Tunis. D’autres à Tlemcen, Miliana, Médéa, Constantine…

Il est certain que ces expulsés d’Espagne apportaient avec eux un savoir-faire professionnel, un potentiel économique et une érudition juive susceptibles de concurrencer les locaux. Dès ce moment, s’établissent les prémices d’un clivage entre « autochtones » (tochavim, les résidents) et les « expulsés » (mégorachim) qui s’accentuera avec l’arrivée massive de 1492.

Encore qu’à ce point il faille préciser, autant que faire se peut, les chiffres : selon l’historien Michel Abitbol, le nombre d’exilés séfarades arrivés en Afrique du Nord est estimé entre 20 000 et 40 000 – bien moindre qu’au Portugal (80 000) ou dans l’empire ottoman (entre 40 000 et 60 000)1.

A  Alger, ces Espagnols sont surnommés kaboussiïn (porteurs de capuches ou de faluches) et les indigènes, chikliïn ou ba’alé hamitsnéfet (« porteurs de turbans »).

Plus riches, bénéficiant d’un entregent économique, voire diplomatique, ces « migrants » – dirait-on aujourd’hui – et leurs guides spirituels, tels le « Ribach », Rabbi Chimon ben Tsémah Duran (1361-1444, « Rachbats ») ou Rabbi Efraïm Encaoua (1359-1442) – sa hiloula à Tlemcen demeure dans toutes les mémoires – l’emportent peu à peu sur les vieux rabbins et s’imposent à la tête des communautés.

Ainsi, en 1394, le « Rachbats » (1361-1444) édicte des ordonnances, les Taqanot d’Alger, portant sur les lois matrimoniales qui s’appliqueront à toutes les communautés d’Algérie : le minhag Castilla – la coutume de Castille – devient celle d’Alger.

De même, Rabbi Amram Efrati, issu d’une célèbre famille de rabbins de Valence, devient celui d’Oran.

En fait, après 1492, l’arrivée de juifs espagnols s’étale jusqu’au XVIe siècle qui connaît un afflux de marranes du Portugal, de France, d’Italie (Livourne essentiellement, longtemps centre intellectuel du judaïsme maghrébin, grâce à ses imprimeries) et même de Constantinople.

Au début, cette hégémonie grandissante n’alla pas sans heurts avec les tochavim, furent regardés de haut par ces expulsés qui se considéraient un peu comme des hidalgos du judaïsme, mais, assez vite, en Algérie, les deux populations se mélangèrent, ne serait-ce que par les unions matrimoniales. (Ce qui ne fut pas le cas, comme on sait, de la Tunisie voisine où le conflit entre Touansa (« Tunes ») et Grana (originaires de Livourne) fut fort vif et dura jusqu’au XXe siècle…)

 

Ces « séfarades » apportent avec eux leur liturgie qu’ils imposent à toutes les communautés juives du Maghreb de même que leur interprétation des lois de la Halakha. Cette influence, pour ne pas dire cette prédominance, s’exerça au fil des siècles.

A quoi il convient d’ajouter la faveur de la Cabbale, née en Espagne et en Provence, qui se répand à la fois dans les cercles érudits et populaires. Non sans conflits, parfois, lorsque certains rabbins introduisent les enseignements du Ari (Rabbi Ytshak Louria Ashkénazi) dans la liturgie : longtemps, Alger a connu ainsi deux rituels de prières, celui des mékoubalim et celui des pachtanim.

En fin de compte, le judaïsme algérien dans sa majorité – autant que le marocain et le tunisien –se rangea dans le camp de la Cabbale – et je me souviens encore de la Hévrat Hazohar de mon enfance à Constantine et des études et pratiques de mon père – et des minhagim cabalistiques dans la prière, les coutumes populaires (amulettes, feuilles de protection pour la femme accouchée, etc.) ont façonné ce judaïsme-là, à l’instar de la plupart des communautés séfarades dans l’ancien empire ottoman.

Sous l’empire ottoman, puis sous le régime de la France, la fusion entre juifs locaux et espagnols devient quasi-totale, à l’exception, sans doute, de quelques familles fières de leur ancienne filiation ibérique. Mieux, l’acculturation avec l’environnement arabo-berbère est profonde, y compris aux lendemains de la conquête française.

A dire vrai, je ne peux m’empêcher de faire un rapprochement et d’évoquer, ici, les efforts de conquista de l’Alliance israélite universelle et du Consistoire du judaïsme algérien dès 1842, avec la mission « civilisatrice » des notables juifs marseillais, Jacques Isaac Altaras et Joseph Cohen. La suite de cette histoire, vous la connaissez…

Je terminerai sur une note personnelle.

J’ai le bonheur d’être l’époux d’une authentique séfarade, une Samekh Tet pur jus, dont la famille est originaire de Salonique.

Encore que, lorsque nos rabbins algériens – tel mon arrière-arrière-grand-père, Sidi Eliayou Bahi Allouche, ajoutaient à la signature de leurs ouvrages la mention ס''ט, qui signale leur qualité de séfaradi tahor, de « pur séfarade », ils pouvaient avoir à l’esprit cette clause de style éminemment modeste des érudits : Sina Tina, « [Je ne suis que] poussière et cendre. »

Mais passons…

J’ai dit : « authentique » séfarade, parce que c’est elle qui le dit – réminiscence sans doute de cette hidalguía (esprit chevaleresque typiquement espagnol) dans certains esprits nostalgiques de l’Espagne –, et, du coup, elle n’est pas loin de me considérer, les jours mauvais, comme une sorte de « bougnoule », qui, tout de même, connaît de deux ou trois choses de la chose séfarade…

D’un naturel bienveillant, je lui fais valoir – et je vous rappelle, à vous qui n’en avez pas besoin – que nous, les « bougnoules » algériens, avec nos frères marocains et tunisiens, nous sommes, de fait, les authentiques héritiers de l’héritage séfarade, à défaut de la langue espagnole.

Mes visites dans différentes communautés et synagogues dans tous les rites d’Afrique du Nord jusqu’aux extrémités du Proche-Orient, m’ont confirmé cette conclusion. Chacun de nous, si l’envie lui en prend, peut prier dans une synagogue syrienne, turque, égyptienne, irakienne ou boukharienne, en ayant l’impression de retrouver la synagogue de son enfance où il priait avec son père. Avec cette prononciation de l’hébreu, ces airs, ces mélodies, cette cantillation venus d’Espagne et répandus, à quelques modulations près, dans toute l’aire séfarade.

Et mon épouse s’en est un petit peu convaincue, un vendredi soir d’antan, où nous participions à l’office de Chabat.

C’était à Salonique…

15 et 16 mars, 20:30 – 22:00  Espace Rachi, Centre d'Art et de Culture, 39 rue Broca, 75005 Paris : En ce temps-là Esther : œuvre biblique séfarade influencée par les cultures perse et française

En ce temps-là Esther, spectacle de théâtre musical proposé par Transmosaïk, fait revivre une œuvre populaire, 90 ans après sa première représentation à l'occasion de la fête de Pourim, le 27 mars 1932 au Théâtre d'Hiver du Megallo-Alexandro à Salonique en Grèce.
Cette œuvre, miroir de l'actualité politique des années 30 représente l'un des derniers bastions de l'activité culturelle séfarade florissante de Salonique.

 "SELECTIONNÉ" dans une mise en scène de Steve SOUISSA à partir du 19/01/2023 jusqu'au 02/04/2023

Résumé : L’incroyable destin du nageur Alfred Nakache, incarné par Amir HaddadAlfred Nakache fait partie de ces héros des temps modernes dont l'histoire est méconnue. Gamin de Constantine, toulousain d'adoption, il est le meilleur nageur français des années 1940. Arrêté par la gestapo puis déporté, il a nagé dans les bassins insalubres du camp d’Auschwitz dont sa femme et sa fille ne sont jamais revenues.
En leur mémoire, ce survivant de l'horreur s’est relevé et a repris la compétition jusqu’à récupérer son titre de Champion de France et représenter à nouveau son pays aux Jeux Olympiques.  

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  Liens du judaïsme algérien

         avec Eretz-lsraël

 

                       Par

 

           Yossef CHARVIT

 

 

 

 

Ue évolution dans l'attitude du judaïsme algérien à l'égard d'Eretz Israël se fit jour dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle.

Elle se manifesta en particulier par une hausse notoire de la aliya, la "montée" vers la terre sainte, qui, de quelques dizaines de personnes par an, passa à plusieurs centaines.

Si jusqu'alors les juifs partaient à un âge avancé, désormais se dessine une tendance à quitter l'Algérie dans la force de l'âge.

Cette évolution est assortie de la diversification des motivations à l'émigration vers Eretz-lsraël : au-delà de celles d'ordre purement messianique qui l'avaient toujours inspirée -- servir le Créateur sur Sa terre, hâter la rédemption et être enterré en terre sainte — s'ébaucha dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle une immigration d'essence séculière, fondée sur la volonté d'exploiter les potentialités économiques offertes par la terre promise, où s'annoncent quelques signes prometteurs de développement.

Quelles sont les raisons de cette évolution, symptomatique de l'époque ? Si les liens entretenus avec Eretz-lsraël constituent un élément décisif dans la conscience collective des juifs algériens, il ne fait pas de doute qu'ils adviennent à une période particulièrement propice.

Ces liens émotionnels trouvaient aussi leur expression dans l'attribution de noms de villes et de localités d’Eretz-Israël à celles d'Algérie, celles surtout qui se distinguaient par la piété de leurs habitants et la qualité de leurs yéchivot : Tlemcen, Constantine, Ghardaïa intitulées dans les sources locales « la petite Jérusalem » ou "la petite Safed ».

Les toponymes de Tibériade, Tsipori, Sichem, Hebron, Beershéva, Tyr, Sidon,, Pays du Néguev, Judée, Galilée servaient également à désigner des localités et des régions du Maghreb.

Source de l'information

Ouvrage "Elite Rabbinique d'Algérie et Modernisation"de Yossef Charvit

À l’occasion de la célébration des soixante ans d’indépendance, des personnalités ont uni leurs plumes pour dire, chacun, son attachement à l’Algérie.

Deux ouvrages sont parus, avec deux titres différents; mais, avec les mêmes textes : un à Paris (Mémoires en miroir) et un à Alger (Je suis vêtue de peau fraternelle).

  "Mémoires en miroir - Algérie-France"
Cet ouvrage broché de 262 pages, a été publié à Paris, le 2 mars 2022 chez l'éditeur HDiffusion 

Extrait de la contribution de Didier NEBOT   

Je voudrais conclure par cette histoire, cette belle action faite par ma mère, à Alger, le jour de mes 9 ans. Je ne veux pas paraitre pour un vieux « cheikh juif » qui radote, mais écoutez-moi car cela s’est vraiment passé comme je vous le raconte :
Pour mon anniversaire de 9 ans, on avait donné une fête dans notre villa de la rue Francis Garnier, près du Parc de Galland, tel qu’il s’appelait lors de la colonisation, et on avait invité une trentaine d'enfants. Pour conclure de façon éclatante cette belle après-midi, ma mère avait décidé de faire une tombola avec comme premier prix une magnifique bicyclette (cadeau exceptionnel dans ce post après-guerre).

De Rebecca Benhamou

Cet ouvrage broché de ‎ 360 pages, est paru le 16 mars 2022 chez l’éditeur Fayard

RACONTER UN PAYS SANS EN PRONONCER LE NOM…

Un matin de décembre, Lila, une jeune violoncelliste, joue un air de Bach pour les habitués du Temps suspendu, un café de la rive gauche, à Paris. Parmi eux, il y a le vieux Salomon, un horloger à la retraite qui, grâce à cette musique, voyage vers un ailleurs qu’il croyait oublié. Vers une contrée située de l’autre côté de la Méditerranée, qu’il a fuie cinquante ans auparavant – un lieu dont était aussi originaire le père de Lila.
Commence alors un échange entre deux déracinés, qui se croisent depuis des années, sans vraiment se connaître. Ils se racontent l’exil, la guerre, le temps qui passe, l’amour. Ils partagent cette terre idéalisée qui a vu naître l’un, mais pas l’autre, et qui pourtant prend toute la place. De souvenirs en confessions, c'est toute une existence, tout un pays, qui revient à la vie...

Pourtant, quand se pose la question d’y retourner, le vieux Salomon hésite. À son âge, à quoi bon abîmer ses souvenirs en les confrontant à la réalité ?

Inspiré de la vie du grand-père de l’auteure, qui a un jour quitté l'Algérie pour ne plus jamais y retourner, ce premier roman oscille entre le fantasme du pays que l’on perd et celui que l’on reçoit en héritage.

Biographie de l'auteur

Née en 1986, Rebecca Benhamou est journaliste et écrivaine. Elle a collaboré à L'Express, L'Obs, Livres Hebdo, Arte et Newsweek.

Classée parmi les « cinq jeunes écrivains à suivre » selon le magazine Vogue en 2019, elle a publié :
- « L'horizon a pour elle dénoué sa ceinture » (Fayard, 2019; lauréat du prix Destin de Femmes/Parité Assurance 2021, finaliste du prix Wizo 2021, et sélectionné pour le prix Livres en Boîte 2021) ; et 
« SURLA BOUCHE », une histoire insolente du rouge à lèvres (Premier Parallèle, 2021). 

« Les habitués du Temps Suspendu » est son premier roman.

De Benjamin Stora 

Cet ouvrage de 128 pages, est paru le 8 avril 2004, chez l’éditeur ‏: ‎La Découverte;

En une centaine de pages, Benjamin Stora parvient à dire l'essentiel de ce qu'il faut savoir sur la guerre d'Algérie :

Quelles ont été les principales étapes de la guerre d'Algérie ? Pourquoi ce conflit de décolonisation a-t-il été si long et sanglant ? Quels sont les principaux acteurs, du côté français et du côté algérien, qui ont conduit cette guerre ? Pourquoi la France en guerre d'Algérie a-t-elle connu un changement de République ? Comment analyser l'idéologie du nationalisme algérien, porté par le FNL, dans sa guerre d'indépendance ? Une autre voie était-elle possible, pour l'Algérie, que celle de l'indépendance ? En quoi ce conflit a-t-il profondément marqué les sociétés françaises et algériennes ?

Dans la presse :

-

 L'Histoire : "Pour retrouver la mémoire de la guerre d'Algérie, Benjamin Stora pose ici les véritables questions et apporte des réponses dénuées de rancœurs et de vains regrets " 

- Le Monde : "Par un auteur qui fait autorité sur le sujet, un exposé historique sur le conflit qui devait déboucher sur l'indépendance, après de multiples péripéties politiques et militaires. Des tentatives de réponses sur les nombreux aspects d'une guerre sur laquelle beaucoup de questions se posent encore. "

- Libération"En une centaine de pages, Benjamin Stora parvient à dire l'essentiel de ce qu'il faut savoir sur la guerre d'Algérie. [...] Dans cette nouvelle édition d'un Repères paru d'abord en 1993, l'historien n'hésite pas à affronter les sujets les plus difficiles, comme le nombre de morts qu'il évalue à près de 500 000. Un livre d'histoire qui permet de sortir des litanies de l'ancienne victime et des autojus tifications aveugles de l'ancien agresseur » 

L'Humanité : "[Le livre de Benjamin Stora] ouvre de multiples pistes de réflexions, voire de controverses, à partir d'une approche chronologique minutieuse".

- Lire"Les faits et les acteurs par un des meilleurs spécialistes de cette période. " 

Biographie de l'auteur

Benjamin Stora est professeur d'histoire du Maghreb contemporain à l'INALCO. Il est notamment l'auteur aux Éditions La Découverte de Histoire de l'Algérie coloniale1830-1954 (coll. " Repères "), d'Histoire de la guerre d'Algérie1954-1962 (coll. " Repères ", nouvelle édition 2004), et de La gangrène et l'oubli (1992-1998).

 

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