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Bienvenue sur le site de l’association MORIAL

Notre objectif : sauvegarder et transmettre la mémoire culturelle et traditionnelle des Juifs d'Algérie. Vous pouvez nous adresser des témoignages vidéo et audio, des photos, des documents, des souvenirs, des récits, etc...  Notre adresse

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Tlemcen, le kiosque à musique au centre ville
Médéa : rue Gambetta (1945)
Alger : rue d'Isly (1930)
Une oasis à Ouargla (Territoire du Sud algérien)
La Grande Poste d'Alger (Photo J.P. Stora)
Square Bresson
Lycée E.-F. GAUTIER D'ALGER
Service Alger - Bouzareah
Alger : le marché de la place de Chartres
MEDEA - Le Café de la Bourse
Guyotville - La Plage

 

Contribution de Didier NEBOT au livre "L'INVISIBLE DE LA RUE  VAUCOULEURS".

Tout porte à croire que, jusqu’au second siècle de notre ère, l’Église naissante et la Synagogue ne formaient pratiquement qu’une seule religion. Les chrétiens semblaient être une secte juive, les Romains ne faisant d’ailleurs aucune différence entre eux, chacun tolérant l’autre. Les disciples des apôtres, lorsqu’ils annoncent la Bonne Nouvelle, le font dans les synagogues.

C’est l’époque où le judaïsme, protégé par la politique philosémite des empereurs Sévères, se développe parmi les autochtones en Afrique du Nord.

Le christianisme en est à ses balbutiements, il s’organise à l’ombre de la Synagogue qui le regarde avec mépris, sans qu’il y ait, pour l’instant, d’animosité réciproque.
Tout change au milieu du II e siècle, où provocations et altercations se succèdent.

Tertullien contre les Juifs

Mais c’est à partir du III e siècle que la querelle entre Juifs et chrétiens éclate au grand jour, avec les attaques violentes de Tertullien. Né à Carthage entre 150 et 160 après Jésus-Christ, c’est un Berbère païen romanisé qui se convertit au christianisme en l’an 193 et qui deviendra le plus éminent théologien de la cité phénicienne. Il va être le premier à inaugurer la littérature chrétienne en langue latine. L’apport de Tertullien dans les controverses christologiques et trinitaires est important. Ses conclusions seront reprises par les Pères de l’Église qui s’inspireront de ses écrits dans leur doctrine. Il est l’un des hommes qui auront le plus influencé les conclusions des grands conciles de l’Église jusqu’au milieu du XXe siècle.
C’est un tableau représentant le Christ sous les traits d’un âne qui mettra le feu aux poudres. Tertullien, ne supportant pas ce qui est pour lui une attaque inique, va répliquer en écrivant un important traité qui sera le point de départ de l’antisémitisme chrétien. Ce traité intitulé, Contre les Juifs, fustigera le peuple maudit. En voici un court extrait : « Les Juifs sont des assassins puisqu’ils ont tué le Christ. Les chrétiens n’ont rien de commun avec eux, sauf le Dieu véritable. Les adeptes de la loi mosaïque sont des idolâtres, ils ont échangé leur Dieu contre une statue d’âne en or. Elle n’a existé que pour préparer le terrain au christianisme nouveau et souverain. L’ancienne religion doit donc disparaître au profit de la nouvelle. »

Ces formulations claires et directes, ces attaques virulentes contre les Juifs n’avaient alors que peu d’importance. Le christianisme n’en était encore qu’à ses prémices. Il était une religion persécutée, alors que le judaïsme, relativement protégé par les Romains à cette époque, était en pleine expansion parmi les Berbères païens. Mais ce n’était pas la préoccupation de Tertullien, lequel n’avait qu’un seul but : imposer cette foi naissante.
Le judaïsme n’avait nul besoin de répondre à de telles critiques. Il se sentait fort, il n’était pas nécessaire pour lui de préparer une contre-riposte à ce qu’il considérait comme des gesticulations inutiles. Mais les attaques contre les Juifs continuèrent avec force et violence, sans répit, dans les zones contrôlées par Rome, tout au long des IIIe , IVe et Ve siècles. Saint Cyprien, l’un des rares à être relativement modéré à leur égard, les assimile aux hérétiques. Marcus Minucius Félix, dans son traité Octavius, les attaque à son tour, de même que Commodien, qui fut très virulent.

Une nation déicide, selon saint Augustin

Au IV e siècle la polémique prend une ampleur nouvelle. Rome devient chrétienne et tout change alors. Ce qui n’était encore qu’une sourde animosité se transforme en haine. Les deux religions se dressent l’une contre l’autre avec une féroce âpreté. Les chrétiens se proclament peuple élu. L’Empire se fait le support de l’Église, se disant l’héritier légitime de l’Alliance.

Avec saint Augustin, la polémique prend un tour nouveau. Elle est d’une précision diabolique et servira de base aux attaques que mènera l’Église contre le peuple maudit au cours des siècles. Samira Sehili Kooli, dans son étude concernant les Juifs en Afrique romaine, cite avec minutie cet illustre Père de l’Église, dans son Sermon contre les Juifs qui reprend à son compte toutes les critiques de ses prédécesseurs en les approfondissant. Voilà ce qu’il écrit du peuple « inique » dont la dispersion parmi les nations du monde n’est qu’une juste punition divine : « Oui c’est à vous que je m’adresse, ô Juifs, à vous qui jusqu’à ce jour avez renié le Fils de Dieu… Et comme les Juifs ne purent supporter la fermeté de ses paroles, qu’ont-ils fait ? Ils l’ont pris, ils l’ont flagellé, ils l’ont bafoué, ils l’ont souffleté, ils l’ont souillé de crachats, ils l’ont couronné d’épines, ils l’ont élevé sur la croix et enfin ils l’ont mis à mort. »
Dieu a donc puni cette nation déicide, poursuit saint Augustin, ajoutant qu’elle fut de ce fait asservie par ses ennemis et réduite à la captivité. Les Hébreux furent « arrachés et comme déracinés de la ville de Jérusalem, la capitale de leur royaume, et soumis à l’Empire romain ».
Pour saint Augustin, l’asservissement des Juifs est dans l’ordre du temps, ils sont devenus logiquement les esclaves des chrétiens, même s’ils portent les Livres de la foi chrétienne. Ils sont leurs libraires « semblables à ces esclaves qui portent les livres de leur maîtres derrière eux ». Selon lui, il ne faut pas mélanger les deux religions. Tout ce qui est pur et fidèle est chrétien, tout ce qui est faux et perfide est juif.

Saint Jérôme est lui aussi extrêmement violent, puisqu’il considère que quiconque observe les lois émanant des « synagogues de Satan » tombe dans le « gouffre du démon ». Le judaïsme étant une religion révolue avec l’arrivée du Christ, il ne faut donc plus l’observer. Ceux qui nient le Christ sont de faux Juifs car il faut être juif par l’esprit, la religion, le cœur, et non pas par la chair. Le judaïsme est assimilé à une hérésie combattue en tant que telle.

Rendre les Juifs détestables pour imposer le christianisme

Devant des masses berbères tout acquises aux lois de Moïse par leurs affinités culturelles, il fallait démontrer que le judaïsme existait toujours, et que seuls ceux qui avaient reconnu la parole de Jésus étaient de vrais Juifs. Un tel discours sur cette terre africaine n’était pas concevable dans d’autres régions, où les peuples n’avaient aucun lien avec « l’esprit sémitique » qui animait l’Afrique. C’est pourquoi ces propos assimilant les chrétiens aux Juifs ne furent pas retrouvés plus tard parmi les autres auteurs chrétiens, tout aussi virulents à leur égard.
Cette polémique violente et excessive trouvait son origine dans la difficulté qu’avait le christianisme à s’imposer auprès des masses berbères païennes. Il fallait faire peur et rendre les Juifs détestables. Le christianisme n’en était qu’à ses débuts, peu de gens croyaient en sa doctrine et il cherchait à s’imposer. À l’inverse, le judaïsme était non seulement toléré par les autorités romaines, du moins au début, mais il était surtout très apprécié par le monde phénico-berbère. Il fallait donc le reléguer au second plan, le discréditer.

L’origine européenne de l’antisémitisme racial

Ces textes haineux et violents, repris par la suite par bon nombre d’auteurs chrétiens, allaient être le fondement de ce qui sera plus tard appelé l’antisémitisme. Initialement, il n’était pas question pour les Pères de l’Église de faire disparaître le judaïsme ; la théologie chrétienne lui assigne un rôle à jouer. Même après la venue du Christ qu’ils ont rejeté, les Juifs ont une place à tenir, ils seront des témoins. Aussi l’Église veille-t-elle à leur survivance ; la haine ne doit pas aller jusqu’à leur extermination. On leur reconnaît le droit à l’existence qu’on refuse aux hérétiques et aux païens, car l’Église considère comme un devoir de prier pour le salut de l’âme des Juifs.
Dans la sphère d’influence berbère, où les Sémites païens et chrétiens étaient nombreux, ces attaques touchant le fondement de l’être n’avaient pas de connotations raciales. De nombreux autochtones se sentaient des affinités avec les Hébreux. En revanche, il en alla plus tard tout autrement dans le reste du monde. Ainsi, lorsque le christianisme se développa dans ce qui plus tard serait l’Europe, parmi les Gentils, il atteignit des couches populaires qui n’avaient aucun lien de parenté avec les Juifs, ni avec les populations sémitiques de l’Afrique. C’est là que naquit la haine raciale qui devait traverser les siècles.

Même si l’intention initiale de la hiérarchie ecclésiastique n’était pas de détruire le peuple juif, les textes des Pères fondateurs de l’Église avaient distillé leur venin de façon irréversible. Il se créa donc un antijudaïsme primaire. Les populations ne retenaient qu’une seule chose : les Juifs avaient tué le Christ, ils étaient maudits pour l’éternité. Cet antijudaïsme viscéral se diffusa jusqu’à l’époque moderne parmi les nations du monde, l’Église ne faisant rien jusqu’à Jean XXIII, au XXe siècle, pour supprimer ou rendre caducs ses textes haineux et provocateurs.

L’antisémitisme est devenu l’antisionisme

En ce qui concerne l’Afrique du Nord, le tournant décisif eut lieu au début du IV e siècle, lorsque les empereurs romains se convertirent au christianisme, qui devenait la religion dominante, et durent à ce titre combattre tous les opposants susceptibles de l’affaiblir. Politique et religion interférant alors aux yeux des Romains, le christianisme d’État était un moyen de domination destiné à consolider l’unité spirituelle de l’Empire. Pourtant, il n’était pas encore question d’interdire au judaïsme d’exister. Simplement, son influence devait être contrôlée.
Ces textes d’une violence inouïe, repris durant des siècles par bon nombre d’auteurs chrétiens, allaient être le fondement de l’antisémitisme avec toutes ces persécutions et massacres. Aujourd’hui, surtout dans le monde musulman, l’antisémitisme est devenu subrepticement l’antisionisme et la notion de peuple déicide a été remplacée de façon perfide par peuple d’apartheid.
Toi, Sarah Halimi, tu en as été malheureusement l’une des nombreuses victimes.

Pour en savoir plus

https://www.morial.fr/18-actualites/2717-l-invisible-de-la-rue-vaucouleurs.html

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