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Guyotville - La Plage

EXIL DES JUIFS DE CYRENAÏQUE VERS LES STEPPES PRESAHARIENNES

  

                       Par

             Didier NEBOT

 

 

 

 

 

Les survivants juifs et libyens (les Romains ne faisaient aucune différence) prirent donc le chemin de l’exil. 

Selon Ibn Khaldoun, Carette (Exploration scientifique et migrations des tribus de l’Aurès), Mercier (Histoire de l’Afrique septentrionale) et Lartigues (Monographie de l’Aurès), on sait qu’il s’agit des Louata ou Laouta et des Aourir’i.

Ces derniers donnèrent naissance plus tard à la tribu des Aoureba – ou Ouareba, ou Aureba, l’orthographe variant selon les auteurs –, qui se singularisa dans sa lutte contre les Arabes.

Comme il leur était interdit de s’approcher des villes et des zones contrôlées par Rome, ils se réfugièrent dans des régions semi-désertiques, toutes proches du Sahara, et passèrent nécessairement par la trouée qui existe entre le djebel Demmer, en Tripolitaine, et l’Aurès, en Numidie, seul chemin possible et qui à cette époque n’était pas encore sous contrôle romain. Cependant certains durent s’arrêter dans le djebel Nefouça, en Tripolitaine, où subsistent d’importantes traces de plusieurs communautés juives. (Elles ont été répertoriées au XIXe siècle par Slouschz, dans un voyage d’études, nous en reparlerons un peu plus loin.) La plupart des autres errèrent au gré des circonstances, loin de l’Empire, dans des conditions difficiles.
Un passage du Midrash parle de la pénétration des juifs dans ces régions : "Certains d’entre les juifs sont exilés jusqu’à la Berbérie, certains autres jusqu’en Mauritanie".
Partageant la même infortune, les exilés juifs et libyens, c'est-à-dire berbères, se mêlèrent, adoptèrent une vie nomade et demeurèrent loin des limes romains. Ils fondèrent des tribus judéo-libyennes nomades pratiquant un judaïsme syncrétique, qui, avec le temps, eut peu de points communs avec le judaïsme talmudique des habitants des zones côtières et civilisées, qui, eux, parlaient le latin. Ils continuèrent leur culte dans les proseuques qu’ils utilisaient régulièrement lorsqu’ils étaient en Cyrénaïque. Comme dit plus haut, il s’agissait de lieux de prière en plein air, très pratique dans ces zones semi désertiques et où le nomadisme était la règle. Nul besoin d’écrire, juste des recueillements sous forme de prières rudimentaires individuelles ou collectives, sous la direction parfois d’un guide, une sorte de prêtre rural aux connaissances un peu plus approfondies que les autres.

Loin des cités sous influence romaine, loin des livres et des écrits, ils s’éloignèrent progressivement de leurs frères « judéens » qui étaient à Carthage et ses environs.
Ce critère d’alliance et de fusion entre juifs et libyens, c'est-à-dire berbères, sera objectivé plus tard par l’éminent auteur arabe Ibn Khaldoun qui souligne la grande importance numérique de ces tribus juives de l’arrière-pays africain. Cette grande importance numérique ne peut se concevoir que si ces différentes ethnies, cohabitant depuis longtemps, étaient réunies. Or dans le malheur les différences s’estompent et la symbiose est plus aisée. C’est une des explications du nombre important de tribus juives disséminées sur une grande partie de l’Afrique du Nord à l’époque préislamique.
Ce phénomène s’accentua ensuite, lorsque les Sévère furent au pouvoir. Désirant augmenter la surface des zones cultivables, ils reculèrent les limites des limes, surtout en Tripolitaine et en Numidie, expropriant violemment de nombreuses tribus qui durent se replier vers le sud. Par chance pour ces dernières, le chameau apparut bientôt, "ce qui entraîna des conséquences politiques incalculables... Chameau et Berbère, l’un portant l’autre, pénétrèrent au Sahara... Aux nomades transhumants des steppes, les Romains avaient substitué les grands nomades chameliers, aigris et prêts à la révolte, organisés en fortes tribus toujours aux aguets, et qui crèveront le limes dès que la vigilance romaine faiblira." ( texte de Marcel Simon)
Ces tribus restèrent dans ces régions excentrées jusqu’à l’effondrement de l’Empire romain et l’arrivée des Vandales (439). Ethniquement, elles devaient être païennes, refusant le christianisme devenu religion d’État, avec la présence dans leurs rangs de nombreux juifs, qui étaient eux aussi persécutés et parlaient un idiome qu’ils comprenaient. Comme le dit René Basset dans son étude sur la religion des berbères : "Chaque tribu renfermait des familles, peut-être des fractions juives en nombre assez considérable pour avoir pu rester indépendantes dans le Maghreb, du moins jusqu’à la fin du IIe siècle de l’hégire."
Les sources rabbiniques et la plupart des auteurs sont peu loquaces sur ces groupements qu’ils ignorent. On peut le comprendre, car le judaïsme de cette époque se développait dans des régions civilisées et commençait à codifier les textes qui allaient former le Talmud et constituer la base du judaïsme d’exil. Comment reconnaître comme frères ces groupes de races mêlées, qui pratiquaient un monothéisme judaïsant primitif et qui ne se distinguaient que par les armes ?

D’autant que les limes romains, c’est à dire la frontière entre les zones occupées par Rome et les déserts où vivaient ces tribus, étaient étroitement surveillées, ce qui empêchaient tout contact entre les différents groupes. Ces populations nomades, seulement soucieuses de leur survie, se déplaçaient constamment et ne laissèrent aucun écrit. Il est donc difficile de connaître leur histoire dans le détail, mais nous avons quand même de nombreux indices précis nous permettant de reconstituer de façon indirecte leur parcours.
Beaucoup d’auteurs arabes du Moyen Âge attestent leur présence. Même s’il faut prendre avec réserve leurs dires, en raison de l’habituelle sécheresse et de la pauvreté de leurs écrits sur le plan historique, ils sont trop nombreux à évoquer ces tribus pour que l’on puisse mettre en doute leur existence.

Surtout, il existe des preuves de cette présence judéo-libyenne dans ces régions désolées. En voici plusieurs exemples :
– Au IVe siècle, dans le Talmud de Babylone (traité Sanhédrin f.94è), il est fait allusion aux dix tribus d’Israël reléguées en Afrique et dans les oasis du Sahara. Il s’agit d’éléments juifs dissidents par rapport au judaïsme traditionnel des villes.
– Abraham ibn-Ezra, au XIIe siècle, parle dans son commentaire sur l’exode « des hérétiques d’Ouargla, ces égarés qui fêtent l’exode au désert à l’instar des Israélites sous Moïse », par opposition avec les juifs des cités sous influence rabbinique.
– Saint Jérôme signale, dans l’intérieur de la Mauritanie, c’est-à-dire loin des zones côtières, la présence de communautés juives nomades. (Epistola 122, 4, Ad Dardanum.)
– A. Ibn-Daoud, dans sa chronique, ainsi que certains passages de textes anciens du début de l’ère chrétienne (Méchilta, Bô chap. 17 ; Deutero. Rabba, V, 14), confirment ces faits.
– La Soura (VII, V.101) du Coran s’applique, selon les commentateurs, à une de ces tribus situées au Maghreb.
– Maïmonide fustige ces gens-là : "Bien qu’ils soient très attachés à la croyance de Dieu, ils ont les mêmes superstitions et les mêmes pratiques que les Berbères musulmans. "
– Plusieurs auteurs arabes citent l’existence de tribus juives indépendantes au Sahara vers le IXe siècle.
– Le Kartas dit des Senhadja : "Ces tribus habitaient les environs de la ville de Teklessyn, elles étaient arabes et pratiquaient la religion juive."
– Le Kitab el-Adouani explique : "Les gens du Sahara descendent de Adjoudj ben Tikran le juif." Ces faits sont confirmés par El Kairouani.
– Eldad le danite, un voyageur juif, signale au IXe siècle la présence de tribus juives dans le Sud marocain.
Toutes ces tribus juives, qui existaient dans des régions situées très au sud et loin de l’ancienne influence des villes romaines et phéniciennes, avant que l’islam soit implanté dans le Maghreb, prouvent que les zones nomades étaient judaïsées de manière importante.
Il faut aussi citer d’autres tribus qui disparurent au XVIe siècle, entrant quasiment toutes dans le sein de l’islam. Gauthier et M. Simon parlent d’un petit État juif qui s’est maintenu indépendant jusqu’à la fin du XVe siècle, "au Gourara et dans l’extrême nord du Touat, entre Tamentit et Sba Guerrara".

À peu près à la même époque, "la vallée de l’oued Abdi était sous la domination d’une autre tribu juive, connue sous le nom d’Oulad Aziz, qui soutint pendant longtemps des guerres contre ses voisins musulmans. Plusieurs fractions de cette tribu ont conservé la notion de son origine jusqu’à nos jours". Les tribus musulmanes des Drid, dans les environs de Gabès, celles dites Hanancha, près du Kef, sur la frontière algérienne, et celles des Khoumir, sur le massif montagneux s’étendant entre Béja et la Calle, toujours en Tunisie, seraient, selon Cazes, pratiquement toutes d’origine juive. Elles luttèrent contre Idris Ier lorsque l’islam s’imposa, avant de capituler et de se convertir.

Encore aujourd’hui, certains habitants de ces régions ont un vague souvenir de ce passé obscur.

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