Par Didier NEBOT
Malgré la demande du Ribach de passer outre à cette attitude dédaigneuse, la lutte s'amplifia et éclata lors de l'événement suivant : quarante-cinq personnes arrivèrent en bateau de Majorque.
C'étaient des réfugiés de Majorque, Valence et Barcelone. Le prince voyait d'un bon œil leur arrivée dans sa ville car ils devaient payer double ; en effet, c'était la nouvelle loi, alors qu’auparavant, on accueillait les rescapés gratuitement. Ainsi, les Juifs continuèrent à s'enfuir d'Espagne pour se réfugier en Algérie après le traumatisme des émeutes qui s'étaient produites en Espagne.
Leur seul but était de continuer vivre leur judaïsme tant au grand jour qu'en secret.
Un jour, 45 réfugiés arrivèrent en Algérie dans un bateau en provenance de Majorque. Certains habitants d'Alger virent d'un mauvais œil la venue d'autres Juifs à Alger. Apparemment, il s'agissait d Juifs d'origine espagnole et non des habitants de l'île. Ceux-ci craignaient d'être touchés du point de vue financier. En effet ceux qui venaient d'Espagne possédaient, pour la plupart les mêmes qualifications économiques et commerciales. Les Majorquins craignaient donc la concurrence.
Ce même Untel avait oeuvré auprès du gouvernement afin d'empêcher le débarquement des nouveaux venus. Il essayait aussi de les convaincre de retourner à Majorque. Dans cette hypothèse, leur retour constituerait un obstacle à la venue d'autres rescapés, lesquels prendraient conscience que les portes de l'Algérie étaient verrouillées devant les Juifs rescapés d'Espagne. En outre renvoyer les réfugiés en Espagne les exposait à des châtiments sévères et mettait leur vie en danger si l'on découvrait qu'ils s'étaient enfuis de la péninsule.
Nous apprenons de la sorte que le gouvernement algérien avait, au début, ouvert ses portes aux Juifs réfugiés, sans même leur demander une taxe d'entrée douanière en Algérie. Dans la ville de Ténès, on apprit de même que le gouvernement local accordait une aide pour l'intégration des réfugiés. Ainsi, ceux-ci eurent droit à des réductions d'impôt par tête alors que les Juifs locaux n'en bénéficiaient pas. Cela provoqua le mécontentement des habitants de la ville. De ce fait, les habitants d'origine musulmane virent d'un mauvais ceil la venue d'un trop grand nombre de Juifs dans la ville. Ils redoutaient qu'une augmentation de la population n'entraînàt un grand besoin et provoquerait une hausse des prix. Ils firent donc appel au juge de l'époque, Alkadaï ben Mahraz, afin qu'il interdise l'entrée des Juifs d'Espagne dans la ville.
Alkadaï ben Mahraz réprimanda les quelques descendant d'Ismaël venus lui demander de ne pas autoriser le débarquement des Juifs sur la côte car cela aurait pour conséquence de provoquer une augmentation du taux d'inflation. Le magistrac, irrité, les chassa de son palais en les insultant : « Je croyais que vous étiez des croyants mais je vois que vous êtes des rebelles. Par conséquent, je ne vois pas pourquoi D.ieu vous apporterait votre subsistance dans le monde ? N'est-ce pas qu'un individu vit sur la simple parole de D.ieu »
Le Cadi, c'est-à-dire le juge, rejeta leur demande car leur crainte provenait d'un manque de confiance religieuse. Et, selon lui, ces plaintifs croyaient que l'homme pourvoyait à ses propres besoins alors que c'est Dieu qui accorde la subsistance au monde entier y compris aux Juifs qui allaient arriver.