À Jérusalem, au centre mondial du Judaïsme d’Afrique du Nord, ce 12 juillet 2016.
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Il est un peu plus de 18 heures, cette magnifique maison du Judaïsme Mondial d’Afrique du Nord bruit doucement. Certains se rafraîchissent, d’autres prient, d’autres encore découvrent ce magnifique écrin restauré avec respect dans la belle tradition de l’architecture marocaine. Il fallait un tel lieu pour « recevoir » la mémoire des soldats juifs d’Algérie durant la Grande Guerre (1914-1918). Et celle des soldats juifs d’Algérie lors de la Seconde Guerre Mondiale.
Pendant deux belles heures, nous étions transportés dans un univers, un temps, une géographie que beaucoup d’entre nous ne connaissent que d’une manière succincte.
L’association Moriel, l’une des gardiennes de ces mémoires, était l’artisan de ce moment d’histoire. Moriel en Israël, comme Morial en France, sont aussi concernées par la recherche, la connaissance de cette histoire. Il est important que les jeunes générations sachent l’histoire de ces soldats, leurs grands-parents ou leurs arrières -grands- parents.
Que ce soit à Paris, Jérusalem ou ailleurs. Que la recherche universitaire, que les ministères de l’éducation intègrent, enfin, cette page de notre histoire.
Tous les membres de Moriel étaient sur le « pont » : Me Jean-Charles Bénichou, Julien Zenouda, Claude Laloum, Ariel Carciente et le maître de séance Stéphane Cohen.
Après les souhaits de bienvenue de Stéphane Cohen, après l’introduction
du président Jean-Charles Bénichou, vint le moment de la conférence de Norbert Bel Ange.
Il y eut au tout début ce moment fort : Norbert Bel Ange demanda aux personnes présentes d’évoquer rapidement la mémoire de leurs Poilus : qui un père, un grand-père, un grand-oncle, un proche… Moment chargé d’une grande émotion voire de recueillement.
Vient le moment de la conférence proprement dite.
Pendant une heure trente environ, Norbert Bel Ange rappela l’histoire des Poilus juifs d’Algérie et de leurs enfants, soldats de la Seconde Guerre Mondiale.
Les soldats juifs d’Algérie, au nombre de 14 000 prirent part à tous les combats, de Verdun aux Dardanelles, en Turquie. Souvent sous l’uniforme aux culottes rouges bouffantes et chéchias, nos Zouaves ont été de valeureux soldats. Près de 3 000 d’entre ont été déclarés « morts pour la France ». Il ne faudrait pas oublier tous les blessés, les gazés, les handicapés, qui, quelques années plus tard quitteront discrètement leur vie.
De plus en plus éduqués dans les écoles de la république française, depuis les années 1850, ces futurs Poilus avaient au cœur le sentiment patriotique. En même temps, comme pour leurs parents, ils ont grandi dans un climat antisémite détestable, tant dans la société civile que dans les rangs de l’armée.
Entre 1918 et 1939, les Poilus ont dû reprendre, tant bien que mal, leur place dans la société, au sein de leurs familles. On contesta dans une presse virulente et ordurière le cas des pupilles de la Nation, surtout lorsqu’il s’agissait de jeunes juifs.
La communauté juive algérienne est de plus en plus à l’écoute du péril nazi qui monte en Europe. Elle sait ce qui se passe en Palestine, le combat des Pionniers juifs, ces paysans-soldats, qui chaque jour rendent cette terre habitable, vivable et prospère.
Quand arrive le moment de prendre part aux combats de la seconde Guerre Mondiale, ce sont des fils plus conscients de leur patriotisme, de la défense de leurs libertés, de leur condition de juifs qui s’engagent dans la Résistance. Que ce soit à Alger ou à Londres.
À Alger, lors du débarquement anglo-américain du 8 novembre 1942, rien ne se serait passé sans le concours actif, organisé, de ces centaines de jeunes juifs.
Faire d’Alger une ville ouverte telle était leur mission. Effectivement, c’est quasiment l’arme à la bretelle que les troupes américaines sont entrées dans Alger.
Auprès du général Leclerc les anciens du Corps Franc d’Afrique étaient de ces jeunes juifs. Ce sont eux qui s’empareront de Berchtesgaden, le nid d’Hitler !
Continuum ou discontinuité entre ces deux guerres menées par nos Anciens ? Chacun d’entre vous le décidera.
"Écrire l’Histoire, c’est s’approprier le sang qui coule dans nos veines depuis longtemps" écrit l’historienne Arlette Farge. Comme elle écrit aussi que : "Aucun objet d’histoire ne se prend au hasard."
Manifestement, Norbert Bel ange est en empathie avec son sujet, avec les êtres qui " peuplent"» ses recherches et son quotidien de chercheur.
Norbert Bel Ange conclut par un vibrant appel pour que de plus jeunes puissent poursuivre ses recherches. Les associations Moriel et Morial sont prêtes à les aider.
Gageons que de jeunes doctorants s’attellent à de si belles recherches.
N. B. A.